Covid-19 : une catastrophe en masque d’autres

Crédit photo : Christine Redmond

La COVID-19 a bouleversé le monde, faisant des milliers de victimes, détruisant des millions d’emploi et mettant à l’arrêt le monde tel qu’on l’avait connu. Mais au-delà des conséquences humaines, sociales, financières qui chaque jour viennent peser sur notre quotidien, la crise se révèle plus sournoise qu’elle ne le paraissait, laissant progressivement apparaître des catastrophes silencieuses, qui gangrènent le monde d’aujourd’hui et celui de demain. Aide et Action tire la sonnette d’alarme à l’occasion de la Journée Internationale de l’Education (24 janvier). 

La pandémie de la Covid-19 et les mesures de confinement qui l’ont accompagnées ont condamné à l’enfermement des millions d’individus, enfants et adultes, pendant plus de 21 mois. De telles restrictions sociales sur le long terme, même si nécessaires, ne peuvent rester sans conséquence. 

Une incapacité à s’insérer socialement et économiquement

Du jour au lendemain, 1.6 milliard d’enfants ont été déscolarisés dans le monde. Plus de 500 millions ont été exclus de tout éducation et ne pourront probablement jamais rattraper les nombreuses pertes d’apprentissage, laissant craindre un abandon scolaire précoce pour plus de 24 millions d’enfants et une incapacité à long terme à s’insérer socialement et économique dans la société. 

Une santé mentale plus fragile

1 enfant sur 7 a été directement touché par des mesures de confinement sur le plus ou moins long terme… Pour certains, près de 3 ans après le début de la pandémie, la vie n’a toujours pas retrouvé un cours normal. Leur éducation, leurs activités récréatives, leurs relations familiales et sociales ont été bouleversées. Chez les plus jeunes, la crise a fait naître du stress, les a privés de repères fondamentaux, de contacts tactiles et affectifs indispensables à leur développement. Le port du masque chez les adultes risque de provoquer chez eux des retards de langage plus ou moins rattrapables. Pour les adolescents, ceux en âge de comprendre la situation, la préoccupation liée à la pandémie, aux risques de contamination, aux pertes d’emplois et de revenus pouvant toucher leurs familles, ont généré un sentiment de peur, de colère et d’angoisse. Une enquête internationale menée par l’UNICEF et Gallup auprès d’enfants et d’adultes de 21 pays indiquent qu’1 jeune sur 5 âgé de 15 à 24 ans a déclaré se sentir souvent déprimé ou n’ayant plus envie de rien suite à la pandémie. La crise de la pandémie n’a fait qu’aggraver la santé mentale déjà fragile de nombreux jeunes. D’après une nouvelle étude, la contribution aux économies perdue en raison des troubles mentaux chez les jeunes est estimée à près de 390 milliards de dollars par an. 

Une explosion des violences

La période de confinement, l’angoisse de la maladie, les pertes d’emploi et manques de revenu ainsi que l’incertitude de l’avenir n’ont pas épargné les adultes. Eux aussi ont été confronté à un stress important qui a entraîné dans la quasi-totalité des pays du monde une hausse des violences. En France, les appels au service national d’accueil téléphonique pour l’enfance en danger (SNATED) ont augmenté de 89% en avril 2020 par rapport à 2019. Des millions de jeunes filles, condamnées à rester dans leurs communautés pendant des mois de confinement, ont également été exposées aux pires abus. Elles ont subi viols, agressions, harcèlements. Plus de 4 millions de jeunes filles en Afrique Subsaharienne ont été mariées de force durant le confinement et le nombre de mariage précoce, de 12 millions par an avant la pandémie, devrait exploser dans les années à venir.  Les violences à l’égard des femmes ont également bondi de 25% à 111% dans dix pays, au cours des premiers mois de confinement. En Inde, selon la commission nationale indienne pour les femmes, les violences domestiques auraient augmenté de 250 % dans le pays. Du jamais vu. 

Tout commence par l’éducation

Dans ces conditions, quel avenir envisager demain ? Comment les enfants d’aujourd’hui privés des compétences scolaires de base, à la santé mentale fragile et exposée pendant des mois aux pires violences pourraient devenir demain des adultes éclairés, capables de bâtir un monde plus juste et durable ? Et nous ne voyons aujourd’hui que les signes les plus aigüs, les crises les plus violentes et manifestes, mais ce ne sont là que les parties émergées des icebergs vers lequel le monde se dirige et sur lesquels il butera irrémédiablement. D’autres apparaîtront, plus graves peut-être. A moins que nous n’agissions dès maintenant. A Aide et Action nous estimons que tout commencer par l’éducation. L’école n’est en effet pas seulement un lieu d’apprentissage des savoirs. Elle est surtout pour tous les jeunes un espace de résilience. Elle offre un havre de paix, un espace bienveillant encadré de professionnels de l’enfance, où les enfants les plus traumatisés peuvent retrouver un sentiment de normalité et compenser les difficultés psychiques et sociales vécues à l’extérieur de l’école. Il est donc impératif de réouvrir au plus vite la totalité des écoles dans le respect des conditions sanitaires et de former les enseignants afin qu’ils soient en capacité de prendre en charge les jeunes ayant le plus souffert du confinement. Seul l’accès de toutes et tous à une éducation de qualité permettra dès aujourd’hui de bâtir un meilleur monde demain. 

Sources :

  • Unesco 2020
  • Save The Children, Save Our Education, 2020
  • La Situation des enfants dans le monde 2021 – Dans ma tête : Promouvoir, protéger et prendre en charge la santé mentale des enfants, UNICEF 2021
  • SNATED, Avril 2020

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